Les trois chefs d'oeuvre de Blaise Cendrars(5 pages) © Copyright bibliotrutt.com |
C’est aux approches de la soixantaine (il est né en 1887) que Cendrars replié sur lui-même à Aix-en Provence dans la moitié de la France non occupée, libéré de toutes ses fréquentations ordinaires, se met à écrire son autobiographie largement poétisée : L’Homme Foudroyé qui paraît en 1945, La Main Coupée qui paraît tout de suite après en 1946 (je dispose d’une première édition) et Bourlinguer dont le copyright est daté de 1948.
Il est au sommet de son art. Toute sa vie il a accumulé, comme dit t’Serstevens, des visions, des sensations, des expériences, des connaissances. Car Cendrars, comme son ami, est un érudit lui aussi. Il ne collectionne pas autant de livres que t’Serstevens et souvent les perd, mais il lit énormément et il a une mémoire prodigieuse. Alors toutes ces richesses qu’il possède tout à coup le submergent. Le flot coule. Et le style, superbe, s’en ressent. La phrase grouille et part dans tous les sens, se servant de subordonnées, de parenthèses, de retours en arrière, sans jamais perdre son fil d’Ariane. Elle vogue sur les vagues de l’imaginaire, du rêve, de la poésie et part souvent au galop sur les chevaux du fantastique.
C’est dans l’Homme foudroyé qu’on trouve les Rhapsodies Gitanes dont la première, le Fouet, met en scène son ami Gustave Le Rouge. Et comme d'habitude, Cendrars a une façon extraordinaire de le présenter. Au milieu d'un camp de Tziganes, avec une compagne portant une balafre au visage, tout miroir étant banni de son logement, et Le Rouge en champion du fouet. On se doute de l'explication de la balafre. Dans le Silence de la Nuit annonce les récits de guerre qui rempliront La Main Coupée où il raconte, alors que tout le monde traînait dans les tranchées, comment lui, engagé dans la Légion (puisqu'il était Suisse), arrivait encore à faire sa guerre personnelle en allant derrière les lignes allemandes sur des barques flottant dans le brouillard sur l'eau d'une rivière (la Somme je suppose) trucider les Allemands et faucher leurs réserves. On y trouve aussi le Vieux Port qui est un prélude aux ports du monde entier de Bourlinguer : Venise, Naples, La Corogne, Bordeaux, Brest, Toulon, Anvers, Gênes (c’est là que l’on trouve l’histoire des homoncules et du tombeau de Virgile près duquel Cendrars aurait vécu dans son enfance), Rotterdam (je crois que personne qui a lu Cendrars, ne pourra jamais oublier le piano défenestré à Rotterdam par des marins furieux et le bruit de miaulement de milliers de chats fait par les cordes qui vibrent et cassent lorsque le piano éclate au sol), Hambourg et, pour finir, Paris, Port-de-Mer, sous-titré la plus belle librairie du monde, où Cendrars fait le portrait de ce libraire extraordinaire du Quai des Grands Augustins que fréquentait aussi t’Serstevens et même l’ami brésilien et bibliophile Paulo Prado, Chadenat.
Il faut lire la scène : le porche, la voûte, un nom effacé: Americana, une arrière-cour, trois marches déchaussées, un palier obscur, et puis une salle immense, haute de plafond, une infinité de livres, deux ou trois portes donnant sur d’autres salles aussi remplies que la première, le silence, un grand poêle de fonte, toujours allumé, un Godin, précise-t-il, plus tard il corrigera: non un Guise, et derrière le poêle, caché par la fumée, une forme humaine, crachotante et toussotant, portant besicles, foulard, plaid et toque, lisant, toujours lisant, dans un vieux fauteuil Voltaire,
Promenades littéraires, côté Occident
Promenades littéraires, côté Orient
Chroniques d'une vie
Chroniques de l'Homme
accueil
Ingénieur - il faut bien vivre - je n'ai pas arrêté de voyager, pour mon travail, de par le monde.
Tout en ne cessant jamais de voyager, plus encore, par mes livres.
Adepte de littérature mondiale d'abord. Et puis comme cette littérature vous apprend que l'Homme est un (comme disait Etiemble), j'ai commencé à m'intéresser tout naturellement à ces sciences que l'on dit humaines et qui nous parlent de religions, de mythes, de folklore, d'ethnologie, de contes de fées, de langues et d'écritures. D'histoire aussi bien sûr.
Et cela fait maintenant presque vingt ans que j'en parle dans mon Voyage autour de ma Bibliothèque, mon premier site. Auquel j'ai joint un deuxième site, mon Bloc-notes, pour des découvertes plus actuelles.
Mais : « tes textes sont trop longs », m'ont dit mes amis.
« Trop de détails, trop de digressions ».
Ils voulaient probablement dire que je devenais trop pédant et que je les ennuyais. Alors j'ai coupé, élagué, re-rédigé, essayé de rendre mes textes plus lisibles, plus attrayants aussi par la typographie, et faciles à télécharger (en PDF qui a l'avantage de conserver les illustrations, notes de bas de pages et pagination ou e-pub pour ceux qui préfèrent ce mode pour leurs liseuses électroniques). Le résultat : ces Carnets d'un dilettante. Voilà. Je ne sais pas si j'ai réussi. Dites-moi ce que vous en pensez. Si vous en avez envie.