Deux soeurs : ma mère et ma tante. Quand l'Alsace était allemande...(19 pages) © Copyright bibliotrutt.com |
L'armistice entre la France et l'Allemagne a été signé le 22 juin 1940. Le 20 juin Hitler avait déjà nommé un Gauleiter (Gouverneur) pour l'Alsace, Wagner, vieux compagnon de lutte et Gauleiter du pays de Bade voisin. Dès le 21, veille de la signature de l'armistice, Wagner expulse le préfet du Haut-Rhin (celui du Bas-Rhin était déjà parti). L'Alsace venait d'être incorporée - de fait sinon de droit - au 3ème Reich. C'était la troisième fois en 70 ans - durée moyenne d'une vie humaine - que l'Alsace changeait de nationalité. Au cours de cette période elle avait été allemande pendant près de 50 ans et française un peu plus de 20 ans.
Qu'ont alors fait les Alsaciens? Certains ont été tout de suite expulsés (Français de « l'Intérieur », juifs et francophiles notoires, entre autres), d'autres sont partis d'eux-mêmes ou ne sont pas revenus de leur lieu d'évacuation, la grande majorité a essayé de survivre, en s'accommodant, comme ils le pouvaient, du nouveau régime, enfin certains ont accueilli les Allemands avec un préjugé favorable. C'était le cas de ma tante. Et elle est même allée plus loin en acceptant un poste de responsable local dans l'organisation des femmes.
Je ne saurai jamais ce qui a pu l'amener à ces positions. Cela avait été un grand drame pour elle après la guerre. L’épuration, l'emprisonnement, la désillusion, la honte, l'ostracisme, l'isolement. La honte de s'être trompée si lourdement. Et ce fut un drame pour nous aussi. Pour ma mère qui s'était pourtant violemment opposée à sa sœur au cours de la guerre mais qui s'est battue pour la défendre et la sortir de prison. Pour moi qui avais dix ans en 45 et ne comprenais pas grand chose à tout cela. Quand plus tard j'aurais pu en parler avec elle, j'étais marié et cela la gênait de raconter tout cela devant une « Française de l'Intérieur » qui de toute façon ne pouvait rien comprendre aux choses alsaciennes. Il n'y a que la question juive qu'elle a tout de même abordée plusieurs fois. « On ne savait pas, dit-elle, on ne savait rien de cette horreur ». Et je le crois bien volontiers. Je sais que mon oncle avait questionné quelqu'un qui avait été au camp de Schirmeck et qu'il avait aidé à faire libérer et que celui-ci l'avait assuré qu'il n'y avait rien de spécial au camp (le problème c'est que Schirmeck était un simple camp dit de redressement dépendant des autorités locales alors que le véritable camp de concentration, le Struthof, situé dans la même vallée, était directement et étroitement contrôlé par les SS). Bien sûr il devait y avoir des rumeurs. Bien sûr il y avait les textes antisémites haineux, les discours. Mais j’ai suffisamment étudié l’histoire de l’extermination des juifs européens (voir Les trente honteuses et Vienne, Hitler et les juifs, au Tome 4 de mon Voyage autour de ma Bibliothèque) pour savoir que si une minorité non négligeable d’Allemands savaient, la grande majorité ne savaient pas (ou ne voulaient pas savoir) parce que Hitler et ses sbires ont tout fait pour entourer d’un silence de plomb leur « Solution finale ». Et que la vérité ne s'est imposée qu'après la guerre et qu'elle a été tellement effroyable que l'opinion publique européenne a mis des années à appréhender l'énormité de ce crime.
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Ingénieur - il faut bien vivre - je n'ai pas arrêté de voyager, pour mon travail, de par le monde.
Tout en ne cessant jamais de voyager, plus encore, par mes livres.
Adepte de littérature mondiale d'abord. Et puis comme cette littérature vous apprend que l'Homme est un (comme disait Etiemble), j'ai commencé à m'intéresser tout naturellement à ces sciences que l'on dit humaines et qui nous parlent de religions, de mythes, de folklore, d'ethnologie, de contes de fées, de langues et d'écritures. D'histoire aussi bien sûr.
Et cela fait maintenant presque vingt ans que j'en parle dans mon Voyage autour de ma Bibliothèque, mon premier site. Auquel j'ai joint un deuxième site, mon Bloc-notes, pour des découvertes plus actuelles.
Mais : « tes textes sont trop longs », m'ont dit mes amis.
« Trop de détails, trop de digressions ».
Ils voulaient probablement dire que je devenais trop pédant et que je les ennuyais. Alors j'ai coupé, élagué, re-rédigé, essayé de rendre mes textes plus lisibles, plus attrayants aussi par la typographie, et faciles à télécharger (en PDF qui a l'avantage de conserver les illustrations, notes de bas de pages et pagination ou e-pub pour ceux qui préfèrent ce mode pour leurs liseuses électroniques). Le résultat : ces Carnets d'un dilettante. Voilà. Je ne sais pas si j'ai réussi. Dites-moi ce que vous en pensez. Si vous en avez envie.