Ismaïl Kadaré(11 pages) © Copyright bibliotrutt.com |
Je crois qu’il n’est pas nécessaire de présenter Kadaré. Tout le monde le connaît. Tous ses romans ont été traduits et publiés en France, souvent au moment même où ils paraissaient à Tirana. Et ceci grâce à un merveilleux traducteur qui est resté longtemps anonyme : Jusuf Vrioni.
Ce n’est qu’avec la parution de ses Mondes effacés qu’on a eu connaissance du destin extraordinaire de cet homme qui avait tout pour avoir une vie brillante d’Européen (voir : Jusuf Vrioni avec Eric Faye : Mondes Effacés, Souvenirs d’un Européen, édit. J. C. Lattès, Paris, 1998). Issu d’une famille aristocratique d’Albanie (grand-père ayant combattu pour l’autonomie, père ambassadeur de l’Albanie en France, même Premier Ministre pendant une courte période, mère originaire d’une vieille famille albanaise d’Epire, grands propriétaires terriens, maison à Corfou, appartement avenue Victor Hugo), lycéen à Janson, HEC et licencié en droit, grand sportif, sociétaire du Racing, champion de France de volley-ball avec les Français Volants, ami de nombreux membres de la haute société dont les Agnelli, etc. Il revient en Albanie en 1943 après avoir vécu en Italie les premières années de la guerre. Une Albanie qui va vivre quelques années tumultueuses : les Allemands remplacent les Italiens comme force d’occupation, puis la résistance albanaise s’organise: d’un côté les ballistes dont on entendra encore parler dans le Général de l’Armée morte, qui sont des nationalistes partisans d’une grande Albanie ethnique devant inclure le Kosovo et qui vont assez rapidement être taxés de fascistes par le Front National de Libération noyauté par les communistes et qui tient la montagne. C’est lui qui va prendre le pouvoir après la guerre. Et progressivement serrer les vis. Vrioni est arrêté en 1947 comme membre d’une grande famille et espion français. Pendant trois ans il va connaître les interrogatoires, les tortures, les « clapiers humains » (1 mètre 90 sur 90 cm). Enfin procès public en 1950. Et condamnation à 15 ans de prison. A son grand soulagement, dit-il, alors qu’il est parfaitement innocent. Car il craignait d’être condamné à mort ! Il passe alors par toutes les étapes du système concentrationnaire : prisons encore, camps de travail, puis est libéré en décembre 1959. Vient ensuite une longue période où il travaille comme traducteur tout en restant surveillé très étroitement et toujours traité en vieil ennemi du peuple. Ce n’est qu’en 1985 qu’il arrive, grâce à un infarctus et grâce aux efforts de sa soeur restée à Rome, à sortir du pays une première fois. Et ce n’est qu’à partir des années 90 (Vrioni a 74 ans) qu’il peut sortir de son pays plus souvent, pays qu’il sera d’ailleurs obligé de quitter définitivement lors des troubles de 1997 (à l’âge de 81 ans). Si je raconte cette histoire aussi longuement c’est qu’elle me rappelle un peu, en moins dramatique bien sûr, celle des héros de Virgil Gheorghiu (25 Heures). Une vie entière perdue, volée pourrait-on dire, à cause de la folie de notre siècle. Treize ans de prison, de camp, à vivre coupé de tout, coupé des femmes. Plus de 50 ans sans contact avec son frère et sa soeur, ses amis européens, et le plus grave pour lui : la vie, la culture, la civilisation européennes. Et combien de gens, en Allemagne de l’Est, en Hongrie, en Tchécoslovaquie, en Pologne, en Roumanie, ont vécu ce même drame : que de vies volées !
Promenades littéraires, côté Occident
Promenades littéraires, côté Orient
Chroniques d'une vie
Chroniques de l'Homme
accueil
Ingénieur - il faut bien vivre - je n'ai pas arrêté de voyager, pour mon travail, de par le monde.
Tout en ne cessant jamais de voyager, plus encore, par mes livres.
Adepte de littérature mondiale d'abord. Et puis comme cette littérature vous apprend que l'Homme est un (comme disait Etiemble), j'ai commencé à m'intéresser tout naturellement à ces sciences que l'on dit humaines et qui nous parlent de religions, de mythes, de folklore, d'ethnologie, de contes de fées, de langues et d'écritures. D'histoire aussi bien sûr.
Et cela fait maintenant presque vingt ans que j'en parle dans mon Voyage autour de ma Bibliothèque, mon premier site. Auquel j'ai joint un deuxième site, mon Bloc-notes, pour des découvertes plus actuelles.
Mais : « tes textes sont trop longs », m'ont dit mes amis.
« Trop de détails, trop de digressions ».
Ils voulaient probablement dire que je devenais trop pédant et que je les ennuyais. Alors j'ai coupé, élagué, re-rédigé, essayé de rendre mes textes plus lisibles, plus attrayants aussi par la typographie, et faciles à télécharger (en PDF qui a l'avantage de conserver les illustrations, notes de bas de pages et pagination ou e-pub pour ceux qui préfèrent ce mode pour leurs liseuses électroniques). Le résultat : ces Carnets d'un dilettante. Voilà. Je ne sais pas si j'ai réussi. Dites-moi ce que vous en pensez. Si vous en avez envie.