Henry Bauchau, la vieillesse, la mort et Antigone(8 pages) © Copyright bibliotrutt.com |
« On a fait reculer la mort mais pas la vieillesse » écrivait Maxime Cohen en 2008 dans ses Promenades sous la lune, ces essais érudits et surprenants d’un conservateur général des bibliothèques de Paris, très imprégné de culture gréco-latine.
Alors, n’a-t-on pas réussi à faire reculer la vieillesse ? Quand on voit l’incroyable créativité de certains nonagénaires on serait plutôt incliné à penser le contraire. C’est le cas du cinéaste portugais Manoel de Oliveira qui, à l’âge de cent ans, a encore sorti un film sur Christophe Colomb, aussitôt suivi par un autre sur les angoisses mystiques des riches (Le Miroir magique). Il avait déjà 85 ans quand il a réalisé l’un de ses plus beaux films: le Val Abraham (un drame magnifiquement filmé au bord du Douro). C’est à 91 ans qu’il a repris la Princesse de Clèves si dédaignée par notre Président actuel (La Lettre) et c’est à 99 ans qu’il a tourné ce Christophe Colomb - une énigme, dont le sujet apparent est l'hypothèse portugaise de Colomb mais dont le vrai sujet est le temps qui passe. Et c’est aussi le cas de Henry Bauchau avec son dernier roman publié en 2008, alors qu’il a 94 ans, Le boulevard périphérique. Le temps, la vieillesse, la mémoire, la mort, voilà les sujets sur lesquels ces alertes vieillards ont encore quelque chose à nous apprendre. Des sujets sur lesquels ils nous amènent à réfléchir à notre tour.
C’est ainsi que Le boulevard périphérique a longtemps continué à trotter dans ma tête, une fois le livre mis de côté. C’est d’abord un livre sur la mort. Le narrateur va rendre visite, tous les jours, en empruntant le boulevard périphérique de Paris, à sa belle-fille qui se meurt d’un cancer. Ce qui l’amène à se souvenir d’une autre mort, celle d’un ami avec lequel il avait fait de l’alpinisme dans sa jeunesse et qui, résistant, avait été torturé à mort. Annie n’a pas trop aimé cet épisode, trouvant cette amitié un peu particulière et le témoignage de l’officier SS qui avait assisté à sa fin peu vraisemblable. Mais peu importe. C’est une question d’atmosphère. La mort d’un proche fait resurgir le souvenir de la disparition d’un autre proche. Et puis, il s’agit peut-être d’un souvenir personnel de l’auteur. Dans une des biographies de Bauchau je lis qu’il avait un frère aîné qu’on qualifie de « solaire », adjectif qui pourrait très bien s’appliquer à Stéphane, l’ami du roman. Et Bauchau lui-même s’est engagé dans la résistance, l’Armée secrète belge, et a combattu dans les Ardennes où il a été blessé. De toute façon le souvenir de l’épisode en question s’estompe progressivement au fur et à mesure que l’autre drame se précise. Et d’autres questions se posent alors. Faut-il laisser ses illusions à la mourante, elle qui fait encore des projets d’avenir ? Après sa mort faut-il rappeler son jeune garçon qui se trouve en Angleterre pour qu’il assiste à l’enterrement de sa mère et vive son deuil ? Mais c’est aussi un livre sur la vieillesse. Les faiblesses qui vont avec, les ennuis tant physiques que matériels, la difficulté à y faire face. Et puis aussi le changement des rapports de force. Comme l’impuissance du narrateur à influencer son fils.
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Ingénieur - il faut bien vivre - je n'ai pas arrêté de voyager, pour mon travail, de par le monde.
Tout en ne cessant jamais de voyager, plus encore, par mes livres.
Adepte de littérature mondiale d'abord. Et puis comme cette littérature vous apprend que l'Homme est un (comme disait Etiemble), j'ai commencé à m'intéresser tout naturellement à ces sciences que l'on dit humaines et qui nous parlent de religions, de mythes, de folklore, d'ethnologie, de contes de fées, de langues et d'écritures. D'histoire aussi bien sûr.
Et cela fait maintenant presque vingt ans que j'en parle dans mon Voyage autour de ma Bibliothèque, mon premier site. Auquel j'ai joint un deuxième site, mon Bloc-notes, pour des découvertes plus actuelles.
Mais : « tes textes sont trop longs », m'ont dit mes amis.
« Trop de détails, trop de digressions ».
Ils voulaient probablement dire que je devenais trop pédant et que je les ennuyais. Alors j'ai coupé, élagué, re-rédigé, essayé de rendre mes textes plus lisibles, plus attrayants aussi par la typographie, et faciles à télécharger (en PDF qui a l'avantage de conserver les illustrations, notes de bas de pages et pagination ou e-pub pour ceux qui préfèrent ce mode pour leurs liseuses électroniques). Le résultat : ces Carnets d'un dilettante. Voilà. Je ne sais pas si j'ai réussi. Dites-moi ce que vous en pensez. Si vous en avez envie.